On a appris le 21 mars, jour du printemps, que la poétesse francophone Lisette Lombé succéderait pour deux ans au titre de « Poétesse Nationale », porté actuellement et au masculin par le néerlandophone Mustafa Kör. Une troisième femme mais sixième personne à porter ce titre.
C’est en 2014 qu’a été créé en Belgique le titre de « Poète National », se déclinant en « Poétesse Nationale » au féminin. Il sera attribué à partir de 2024 à la slammeuse belgo-congolaise Lisette Lombé. Fille d’une Belge, Claire Monique Dejehet, et d’un Congolais, Jean-Marie Lombe Yangongo, elle fut conçue à Kinshasa mais est née à Namur le 30 août 1978.
Non un titre officiel mais un titre symbolique dans le cadre d’un projet valorisant les échanges littéraires et culturels entre les trois communautés linguistiques de notre pays, il est décerné pour une période de deux ans, le témoin passant alors à un.e poète.poétesse issu.e d’une autre communauté linguistique.
Il est allé au néerlandophone Charles Ducal en 2014, à la poétesse francophone Laurence Vielle en 2016, à la néerlandophone Els Moors en 2018, au poète francophone Carl Norac en 2020, au néerlandophone Mustafa Kör en 2022.
Le Poète National a pour mission d’écrire au moins douze poèmes (six par an) sur des thématiques liées à l’actualité ou à l’histoire de notre pays et/ou de la société. Tous ces poèmes sont disponibles dans les trois langues nationales grâce à un collectif de traducteurs.
Rude tâche que d’associer l’actualité et la poésie. Attentive à la cause des réfugiés et des demandeurs d’asile, Laurence Vielle a aussi subi les attentats de Bruxelles. De son côté, Carl Norac a imaginé les « Fleurs de funérailles » alors que le Covid ravageait le monde. Son objectif était d’offrir à chaque défunt, dont la famille en faisait le souhait, un texte d’adieu poétique grâce à la collaboration de 70 poètes belges.
Il est à parier que Lisette Lombé aura à cœur d’inscrire la poésie dans une démarche populaire et sans doute à destination de la jeunesse. Une jeunesse fortement déboussolée par la crise sanitaire et les privations générées.
« Pas d’épanouissement individuel sans émancipation collective. Pas de scènes sans partage, pas de littérature sans slam, pas d’artistique sans éducation populaire, pas de culturel sans social, pas de démocratie sans paroles citoyennes, pas de poésie sans engagement, pas de vie sans poésie », note-t-elle en exergue sur son site.
Une poésie toute en causes
Enseignante, Lisette Lombé est venue tardivement à la poésie et au slam. Il y a une petite dizaine d’années seulement. Depuis 2015 précisément, année où un burn-out l’a incitée à changer de voie. Elle y a vite trouvé sa place et sa parole féministe et anti-raciste a rapidement été entendue. Comme si on attendait son œuvre, à découvrir sur scène et dans les livres qu’elle a publiés à L’Arbre à paroles, maelstrÖm, L’Iconoclaste, Image publique… Tout récemment chez Robert Laffont pour son premier album jeunesse, illustré par Claire Courtois, « Enfants poètes », où elle évoque la rencontre entre les jeunes élèves et la poésie et la révélation que celle-ci peut générer.
Une fois entendus, les mots de Lisette Lombé ne s’oublient plus. Aigus, rythmés, ils lèvent le poing contre ce qui ne va pas – injustices, racisme, politique, etc. -, soutiennent les causes de l’antiracisme ou du féminisme. Ils disent aussi le corps et l’amour. A n’en pas douter, elle fera une formidable « Poétesse Nationale », fonction à laquelle elle accèdera dès janvier 2024, et nous réservera de belles découvertes poétiques.
Le Poète National est une initiative littéraire conjointe du Poëziecentrum (Gand), de la Maison de la Poésie et de la Langue française (Namur) et de VONK & Zonen (Anvers) en collaboration avec Passa Porta (Bruxelles), la Maison de la Poésie (Amay), le fiEstival maelstrÖm (Bruxelles) et les Midis de la Poésie (Bruxelles). Tous les poèmes écrits et traduits se trouvent sur le site du Poète National.